Quel est le point commun entre ce magnifique enfant au regard facétieux et ce jeune homme si perdu, racontant d’une voix hagarde les abus sexuels et tentative de meurtre qu’il a subis au sein du bouddhisme tibétain ?
C’est la même personne,
voici l’histoire de Kalou Rinpoché
Dès l’âge de 18 mois, Ratak Phuntsok (né en 1990 à Darjeeling dans le Nord de l’Inde), est reconnu par le Dalaï Lama comme le tulkou (la réincarnation) de Kalou Rinpoché, mort en 1989 et chef de la lignée Kagyupa (une des 4 écoles du bouddhisme tibétain).
Un maître vénéré.
Tellement vénéré que, bon… il y a bien cette histoire de violences sexuelles sur sa traductrice anglaise. Mais l’Occident a envie de croire que les lamas sont purs esprits, et la vague #metooguru n’est jamais passée par là.
Il ne sera donc jamais inquiété.
Le petit Ratak est donc désigné comme son successeur, dernière réincarnation de Kalou.
Débute alors pour lui, comme pour tous les enfants tulkou, une vie qui fascine les Occidentaux quand, sous nos latitudes les mêmes agissements déclencheraient une enquête des services sociaux.
Élevé par ses parents jusqu’à l’âge de 7 ans, aimé, choyé, il vit une vie d’enfant star à qui l’on répète qu’il est un personnage très important. Son premier voyage en Europe se déroule alors qu’il a tout juste 4 ans : il vient faire le tour des biens dont il a hérité du 1er Kalou.
Un patrimoine considérable
Pas moins de 44 monastères, dont 16 aux USA, drainant des milliers de fidèles dont de nombreux “people” (Richard Gere en tête).
Le voici donc PDG d’une véritable multinationale du bouddhisme tibétain.
En Inde, il vit dans un monastère avec ses parents et même si son éducation est essentiellement religieuse, il est magnifiquement choyé.
Mais tout s’écroule en 1997. Cette année-là son père meurt.
Ses tuteurs décident qu’il doit être séparé de sa famille, “source de distraction” y compris de sa mère car “un Rinpoché ne peut toucher une femme”. Et l’enfant a une fâcheuse tendance à vouloir… des câlins de sa maman.
Il est envoyé loin de Darjeeling, dans un autre monastère.
C’est désormais Bokar Rinpoché (un autre maître éminent de la lignée Kagyupa) qui est son tuteur.
Dans ce système très féodal, Bokar est le “régent” en attendant que le tulkou puisse être en âge de régner. Commence alors ce que l’enfant désignera plus tard comme : l’enfer.
Débute alors pour lui, comme pour tous les enfants tulkou, une vie qui fascine les Occidentaux quand, sous nos latitudes les mêmes agissements déclencheraient une enquête des services sociaux.
Mais personne ne se doute que derrière la grâce du jeune tulkou se cache une enfance faite de viols et de coups !
Frappé pour avoir rêvé qu’il se mariait.
Violé par d’autres moines.
Menacé d’être “remplacé” s’il se rebelle.
Il continue pourtant à sourire, masquant ses douleurs.
Chacune de ses apparitions fait salle comble. Il est moderne, il tient lui-même ses réseaux sociaux, il se surnomme “premier Rinpoché Facebook”.
Quand il déclare dans un sourire que “la réincarnation dans Call of Duty est plus rapide que dans le bouddhisme”, l’Occident se pâme.
Et puis un soir d’avril 2010,
tout s’écroule !
Il est en France dans un de ses monastères, le Temple des Mille Bouddhas en Saône-et-Loire.
Lors des entretiens individuels avec ses disciples français, une quarantaine de femmes lui racontent avoir été abusées par des lamas.
Cela agit chez lui comme un déclencheur !
Il refuse de passer la nuit au temple et part à l’hôtel. C’est sans doute l’événement qui va provoquer chez lui une remontée terrible de souvenirs d’enfance.
De leur côté certaines victimes portent plainte.
Un an après il revient au Temple des Mille Bouddhas. Alors âgé de 23 ans, il suspend les trois lamas accusés de viols et d’agressions sexuelles. En représailles une partie des lamas décide de lui retirer leur reconnaissance. C’en est trop, il craque !
Témoignage choc
Dans une vidéo qui ne fera guère que 500k vues sur YouTube, il déballe tout.
Les coups, les viols, les drogues qu’il a commencé à consommer pour survivre.
La tentative de meurtre par son secrétaire, furieux d’être renvoyé.
Son désir de tout arrêter et de choisir enfin sa vie.
Son projet faire des études.
Puis il disparaît des radars …
Volte-face, il fait ce qu’on attend de lui
On le retrouve un an après. Quelles pressions a-t-il subies ? On ne sait.
Physiquement il a changé. Il s’est empâté et son sourire semble un peu figé.
Il assume à nouveau le rôle de Tulkou Kalou (ou est-il simplement résigné).
Il supprime la vidéo confession de son compte.
Entre la difficulté d’une vie normale et les pressions de l’entourage, il n’a pas su ou pu résister.
Comme blâmer ce tout jeune homme ?
Aujourd’hui il fait ce qu’on attend de lui.
Ne dit plus publiquement qu’il ne croit pas à la réincarnation. Il a repris les tournées. Provoque les rires enamourés de ses disciples quand il évoque la fameuse vidéo en disant “s’il vous plaît, ne croyez pas ce que je dis dedans”.
Voici encore l’une des histoires les plus tristes du bouddhisme tibétain.
Combien sont-ils, ces gamins à qui on a volé leur enfance, et ceci pour pérenniser un système féodal, et faire rêver les Occidentaux ?